Mon avis sur Tableau noir d'Yves Yersin
Ayant déjà vu un prémontage il y a quelques années (2008,
La Montagne Initiatique) à la scierie Jacot de la Joux-du-Plâne, j'ai été surpris par ce deuxième et dernier montage (vu au ciné Bio à Neuchâtel), car il me semblait que mon impression du prémontage était meilleure.
Au niveau contenu, la fin est bien trop appuyée (larmoyante). On peut certes comprendre la peine de l'instituteur et des parents (qui probablement ont aussi usé les bancs de cette école de campagne), mais on a l'impression qu'une fin moins pathétique (pathos) aurait mieux soutenu le message du film.
Pour cette raison, le film semble manquer d'équilibre: on se pose des questions, mais l'on n'a pas le début d'un élément de réponse; par exemple: pourquoi ces 4 familles ont-elles retiré leurs enfants de cette école, accélérant la condamnation de celle-ci ? La fermeture n'était-elle pas inéluctable à terme ? Quel est l'avis et l'impact sur la carrière de l'assistante-enseignante du film, qui semblait également être impliquée fortement dans la classe et n'était pas proche de la retraite ?
Le but du réalisateur n'était à l'évidence pas d'enquêter sur l'affaire, mais une présentation plus équilibrée, ou le renoncement à forcer le spectateur à prendre position forcément dans la direction voulue, m'aurait peut-être évité cette impression de malaise que j'ai ressentie de plus en plus dès la moitié du film.
Le rythme du film s'en ressent également: les premières parties, qui décrivent l'enseignement novateur de l'instituteur de campagne, relativement courtes et illustrées par l'intertitre au tableau, se prolongent ensuite lorsqu'on aborde le deuxième sujet, soit la fermeture de l'école.
Au niveau technique, je regrette les petites séquences de ralentis qu'il y a parfois avant une transition. Ces séquences de ralentis donnent l'impression que le caméraman n'a pas accumulé
assez de rushes (et pourtant, 1200 heures!) et lorsqu'il a voulu monter, n'a pu qu'utiliser cet artifice assez gênant pour le spectateur. Cela s'ajoute à de nombreux mouvements de caméras parfois trop aléatoires
qui auraient pu être limités avec des plans de coupe, évitant d'ajouter à l'impression voulue de "sur-le-vif" celle d'une finalisation peu aboutie. Vu le temps passé entre le tournage (2005-2006) et
le montage final, n'aurait-il pas été possible d'intégrer des interviews récentes des enfants, dont certains ont certainement le recul nécessaire aujourd'hui pour contribuer des témoignages potentiellement intéressants, voire des enseignant(e)s ?
Globalement, le film est cependant très représentatif de ce que peut être la vie d'une petite école de campagne, avec ses niveaux intégrés et sa pédagogique fortement ancrée dans le réel, le son original n'est pas masqué par de la musique illustrative (heureusement quasi absente), et la plupart des séquences du film sont captées de manière très vivante. J'ai particulièrement bien aimé la
séquence du voyage d'étude en Suisse-allemande, par ses parties pratiques (ingénierie des eaux par l'amusement) et culturelles (Ensiedeln).
Références
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MarcSCHAEFER - 18 Jan 2014